Que la sente débouche parfois sur un complet inattendu. En exemple, Pito 'Henua, le nombril du monde, que je n'aurais pas personnellement forcément placé à cet endroit, qui est une grosse bille de pierre naturelle sensée démagnétiser les boussoles du fait de sa composition volcanique probable. Evidemment, personne n'a de boussole dans ces moments là, en général... En tout cas, elle ne repousse pas les grillons, qui de façon fort intrigante ne ressemblent pas à ceux du reste de la Polynésie (qui ont des ailes fonctionnelles permettant de voler), mais bel et bien à ceux que l'on a chez nous...
Mais bon, en général on débarque ici surtout pour regarder des grandes statues appelées Moaï, qui jalonnent la côte et les carrières où elles étaient sculptées. Le tout agrémenté d'une série complète dans l'évolution de la stylisation et des diverses époques de fabrication. Pour peu, on a aussi droit aux siècles de savants qu'il a fallu pour commencer à proposer des hypothèses plausibles de transport et d'érection, et des siècles de farfelus qui vont encore croire que celle des E.T. est la seule possible...
C'est d'ailleurs un peu ce que doit penser un Pascuan, quand il voit le nombre d'extra-terrestres qui se pointent chaque année sur son île, avec des théories aussi farfelues. Il n'en reste pas moins que ces statues de fortes statures sont réellement très impressionnantes et vraiment magnifiques. Ne serait ce que celle ci, aux yeux de corail, jouxte sur une plage pierreuse sinon caillouteuse, et dont les lichens désséchés luisent d'une lueur pâle sous le clair de lune, alors que les chevaux paissent librement...
Si la fraîcheur apaisante des flamboyants ou des goyaviers plantés le long des ruelles ne vous a pas déjà converti au farniente ou que vous n'ayiez déjà trop sympathisé avec un passant pas trop affairé, les chemins pâturés vous offriront quelque heureuse broussaille à scrupter lentement, et dans un fouillis d'épineux se dressera quelques superbes, en témoigne cette clarté jaune translucide illustrée à votre droite. Avec un peu de patience, vous découvrirez peut être qui vient en butiner les fleurs, je n'en ai malheureusement pas eu l'occasion...
Il est évidemment vain de dire que Rapa Nui est une île où il fait bon se perdre, surtout si vient de démagnétiser sa boussole et qu'on a perdu le Nord ou que l'on est un peu à l'Ouest.
En cas de besoin absolu, tourner en rond fait inévitablement aboutir à cette borne précieuse nous rappelant non les cardinaux mais les villes les plus proches et peu ou prou la distance qui nous sépare de la prochaine station de métro ou de bus. Sans indication, cependant, de où pourraient bien se trouver les yeux ou les doigts de pied du Monde, ce qui est par ailleurs assez frustrant.
Il nous reste alors à dévisager ces curieux bonshommes graves et basaltiques, et regarder avec eux les étoiles qui les rendent si pensifs...
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